Description du projet
Alcôves a pour sujet l’espace de soins psychiatriques dans le milieu hospitalier, compris comme un miroir de la société. Le projet explore le lien entre la construction psychique identitaire et celle - physique – architecturale, autour de la notion de «fonction contenante». Il comprendra la réalisation d’espaces thérapeutiques innovants par une meilleure compréhension de l’interaction entre l’architecture et le projet thérapeutique pluridisciplinaire, pensé à partir des soins infirmiers. Il vise une amélioration de nos savoir-faire respectifs, de nos postures et rôles professionnels dans la société.
Il existe un lien entre la construction d'espaces (l’habitation, la maison, le chez-soi) et la construction identitaire (la personne, l’individu, le moi). Se sentir bien dans sa maison ou en ville, est tout à fait comparable au fait de se sentir à l’aise dans sa peau. Il y a des thèmes similaires : le regard / la fenêtre, la porte / l’ouverture à l’autre. Les murs et le toit sont comme une enveloppe et peuvent protéger d’un environnement hostile (s’isoler) ou plutôt ouvrir sur l’extérieur. Lorsqu’une personne recherche un équilibre psychique, la fonction contenante est primordiale. Celle de l’hôpital avec ses espaces thérapeutiques ne fait pas de doute. L’architecture est aussi un contenant. Apprendre à vivre avec ses sentiments, ses états d’âme, savoir leur donner une place à l’intérieur de soi et dans le monde, c’est un peu comme construire sa maison, son chez-soi.
Le projet s’appuie sur deux expériences vécues: le projet «follies» à l’Hôpital de Prangins (co-constructions par des patients, architectes et soignants dans le parc) et le séminaire master «isolement» (regard croisé de soignants et étudiants en architecture sur l’espace de soins intensifs).
Un regard particulier est porté sur l'espace d'isolement. Parfois le recours à l’isolement peut être nécessaire pour le patient en difficulté. Comprendre pourquoi et à quels moments cet isolement est nécessaire est de première importance pour le patient et pour le soignant. C’est à ces moments qu’il est bénéfique pour la personne de se rassembler, de se sentir en sécurité. Mieux penser et diversifier les espaces d’isolement, les rendre accessibles à d’autres moments, travailler sur plusieurs degrés d’isolement que le patient peut choisir, tour à tour, pour ainsi gérer lui-même son état dans son espace, peut donc contribuer à améliorer son bien-être psychique.
Le projet de recherche s’articule autour de ces questionnements. Mieux comprendre, partager des expériences, concevoir ensemble un espace de soin, le réaliser et le vivre en situation réelle. L’améliorer et faire évoluer les connaissances sur ce sujet.
Quelles sont les particularités de ce projet?
Le projet explore une nouvelle interdisciplinarité: il n’existe à notre connaissance pas de recherches croisant les pratiques de l’architecture et des soins infirmiers autour du sujet de l’espace thérapeutique. Or la pratique du soignant et celle de l’architecte partagent un même univers de préoccupations: l’architecte se doit d’accompagner la ville dans sa transformation, de soigner l’habitat humain. Le soignant aide le patient à se re-construire, et cela demande d’être créatif. Les deux professions sont des pratiques créatives réflexives engagées, autour de l’être humain. Le patient est au centre, à l’hôpital et chez lui: il vit dans un espace que l’architecte aide à aménager. Il est entouré d’une équipe de soins qui l’accompagne dans son projet thérapeutique. Construire ensemble est un projet dans lequel les trois trouvent leur place.
L’espace d’isolement à l’hôpital est de plus en plus pensé en tant qu’espace d’enfermement de dernier recours – suivant des critères sécuritaires et hygiénistes. Le fait de considérer ce lieu comme un espace de vie, de traiter le thème de l’isolement en amont de la crise dans le processus de soins, en analysant son lien à l’habitat humain peuvent apporter un nouveau regard sur les rapports entre l’architecture, les soins en psychiatrie et la société.
Etat/résultats intermédiaires
Des ateliers de croisements de pratiques ont été organisés et permis de co-concevoir des espaces thérapeutiques, dont un espace de soins intensifs pilote en attente de réalisation au CHUV. La réflexion a d’emblée été élargi à l’espace thérapeutique au sens large du terme, allant de l’espace de soins intensifs à l’unité de soins et au delà : au monde associatif, seuil entre l’institution et la société et la société « elle-même », remettant l’accent sur l’importance de la perméabilité de ces lieux de vie pour la santé mentale.
Dès la première phase du projet débuté en avril 2013, le choix d’un site d’intervention pour cette réalisation, puis l’approbation de son projet ont été un processus particulièrement intensif et d’une durée plus longue que prévue. Cette réalisation étant un jalon important pour le projet un rallongement du planning été jugé dans l’intérêt du projet.
Ce projet pilote est co-conçu par un groupe de transdisciplinaire impliquant des architectes, soignants du site retenu et du DP CHUV, membres de l’observatoire de soins du CHUV, de sa direction des soins, médecins, patients et proches aidants. Sa réalisation est maintenant imminente, et devra servir de base d’observation pour la suite du projet.
Un séminaire de recherche «contenance» organisé en avril 2014 avait permis de thématiser, à travers le rapprochement entre l’architecture et la psychiatrie, le lien entre l’institution hospitalière et la société, sujet déterminant pour la dernière phase du projet. Depuis 2014, la réflexion a été étendue à la fondation Nant (projet d’architecture pour la psychiatrie des personnes agées) et à l’antenne du Graap à Montreux (réflexions en prévision de l’aménagement de nouveaux locaux).
En 2015, une action intitulée «Follies», une co-construction entre architectes, soignants et patients du CNP a permis de tester et d’enrichir certains résultats intermédiaires des croisements pratiques. Une publication sommaire de l’action dans un ouvrage sous la direction de la Haute école de travail social et de la santé - EESP à Lausanne est en cours. Depuis 2015, les résultats font l’objet d’explorations dans le cadre d’enseignements à l’Ecole Spéciale d’Architecture de Paris (programme master «habiter l’anthropocène» et de la HES-SO du canton de Valais (filière travail social, module «l’architecture de la psychiatrie»).
Publications
Revue de presse
«Follies», dans le journal du mardi 15 septembre 2015, canal Alpha
«Alcôves, une recherche participative», in Diagonales 98, Lausanne, mars 2014
«Inventons ensemble les espaces de soin de demain», in Diagonales, Lausanne, mars 2013
Liens
Personnes participant au projet
Psyché – Research group in architecture and construction of identity
Prof. Dr. Pieter Versteegh, responsable de projet
Prof. Alain Saudan, architecture
Mathieu Monbarron, architecture
CHUV DP
Jean-Michel Kaision, directeur des soins DP
Jean-Philippe Duflon, infirmier, sociologue, dir. adjoint des soins
Didier Camus, infirmier, spécialiste clinique, observatoire des soins
Boris Pourré, infirmier spécialiste clinique
Groupe d'accueil et d'action psychiatrique (GRAAP)
Jean-Pierre Zbinden, directeur, responsable pour le GRAAP
Centre Neuchâtelois de Psychiatrie (CNP)
Catherine Cellier, infirmière spécialiste clinique, sociologue
Experts et suivi de qualité
Dominique Friard, infirmier, rédacteur «Santé publique», France
Alain Fidanza, architecte
Prof. Dr. Jaques gasser, Directeur DP
Madeleine Pont, présidents
Dernière mise à jour de cette présentation du projet 13.09.2021